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Les rencontres des transitions – Webinaire #7

Les GFA et SCI citoyennes, outils collectifs pour la préservation des terres agricoles

Le 24 octobre 2024, de 13h à 14h

Dans un contexte où la pression sur les terres agricoles s’intensifie, la préservation de notre patrimoine agricole est devenue plus que jamais une priorité. Ce webinaire propose d’explorer des solutions citoyennes et collectives pour protéger ces terres vitales, en mettant l’accent sur les Groupements Fonciers Agricoles (GFA) et les Sociétés Civiles Immobilières (SCI) citoyennes.

Avec Julian Ackermann Aredes – Chargé de mission juridique à Terres de Liens.

Lien vers l’enregistrement de l’intervention : https://youtu.be/j024y8GcJgo

Retranscription de la séquence de questions avec le public

La loi Climat et Résilience et l’objectif de Zéro Artificialisation Nette (ZAN) peuvent-ils constituer des leviers efficaces pour encourager l’allocation des terrains disponibles à des fins agricoles plutôt qu’à l’urbanisation ?

Julian Ackermann Aredes : Cette loi fixe des objectifs de réduction de consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers (ENAF). Cela passe notamment par la limitation de l’urbanisation et la révision par les collectivités territoriales de leurs Plans Locaux d’Urbanisme (PLU). En ce sens, cette loi et cet objectif contribuent sur le long terme à la préservation des terres agricoles. Cependant, un autre sujet à garder en tête est la question du logement paysan. L’objectif ZAN semble ici entrer en contradiction avec les difficultés croissantes que rencontrent des paysan.nes souhaitant s’installer et construire des bâtiments d’habitation.

Justement, les groupements fonciers agricoles (GFA) et sociétés civiles immobilières (SCI) citoyennes ne semblent pas répondre directement à la question du logement paysan. Dans le cas d’un GFA-bailleur par exemple, le.a paysan.ne est locataire sur les terres appartenant au collectif et éventuellement locataire des bâtiments d’habitation associés à la ferme. Lors de son départ à la retraite, cette personne se retrouve sans logement, et ne bénéficie souvent que d’une petite retraite, insuffisante pour accéder à la propriété ou même à la location.

Julian Ackermann Aredes : Effectivement, cette question est au cœur des préoccupations du mouvement Terre de Liens et de ces initiatives foncières citoyennes. Si les GFA et SCI permettent l’accès au foncier agricole, elles ont plus de difficultés à répondre à l’impératif du logement paysan, et ce pour plusieurs raisons. L’achat d’un logement d’habitation nécessite souvent des capitaux considérables, des fois bien supérieurs à l’acquisition de foncier agricole, et plus difficile à mobiliser. D’un point de vue juridique, le choix du type de bail est à considérer. Par exemple, dans le cas du bail emphytéotique de longue durée, le.a paysan.ne est locataire du logement et bénéficie souvent d’un loyer très bas, mais les améliorations apportées au logement par le.a locataire ne pourront pas faire l’objet d’une indemnisation lorsque le bail arrive à son terme. A l’inverse dans le cas du bail rural, ces améliorations peuvent faire l’objet d’une indemnisation, mais qui reste faible. Aujourd’hui, en Bretagne, on observe généralement que l’acquisition du logement par les paysan.nes se fait en dehors du contexte du GFA ou de la SCI. Mais cette question renvoie aussi à la question du revenu paysan qui aujourd’hui est extrêmement faible.

La création d’un GFA ou d’une SCI se fait-elle parfois à l’initiative de groupements citoyens, motivés par l’envie de préserver des terres agricoles, lutter contre l’agrandissement ou créer de l’activité économique près de chez eux, qui vont ensuite rechercher des paysan.nes intéressé.es par le projet ? Quels sont les freins à ces initiatives citoyennes ?

Julian Ackermann Aredes : On observe souvent deux types d’initiatives citoyennes : Soit la création du GFA ou de la SCI est motivée par un projet paysan déjà réfléchi, pour lequel du foncier agricole a déjà été identifié, et qui va mobiliser des citoyen.nes pour apporter de l’épargne; ou bien la création est à l’initiative des épargnant.es, qui vont ensuite chercher un projet paysan qui correspond à leurs envies. Le second type d’initiative est souvent facilité par un ancrage territorial, des liens interpersonnels assez forts pour permettre de s’organiser et de mobiliser le capital nécessaire à un tel projet.

Quelles sont les obligations fiscales pour les associé.es ?

Julian Ackermann Aredes : Les GFA et SCI sont soumises non pas à l’impôt sur les sociétés, mais à l’impôt sur le revenu foncier. La structure déclare donc son résultat fiscal en fonction des bénéfices réalisés, et ce sont les associé.es qui s’acquittent de l’impôt, proportionnellement au résultat fiscal déclaré et à leur part dans le capital social. Ce mode de fonctionnement peut représenter un inconvénient pour les associé.es, qui devront s’acquitter de l’impôt même si le GFA ou la SCI choisit de ne pas redistribuer les bénéfices (dans une logique de lucrativité limitée).

Une seule structure peut-elle financer plusieurs projets différents ? Par exemple, sur 2 territoires différents, ou 2 activités très différentes, voire une activité agricole et une activité de préservation de forêt, etc.

Julian Ackermann Aredes : Oui, bien sûr, sous réserve des particularités propres à chaque type de structure. Étant donné que l’objet d’un GFA doit être agricole, la préservation d’une forêt y est plus complexe, sauf peut-être dans le cadre d’un projet d’agroforesterie. Du reste, il n’y a pas de limite à la portée territoriale d’un GFA ou d’une SCI, et au nombre de projets portés par la structure.

Comment évolue le capital social d’un GFA ou d’une SCI ? Quelles peuvent-être les conséquences sur les parts des associé.es ?

Julian Ackermann Aredes : La portée non-lucrative de la participation à de telles initiatives influence la manière dont est géré le capital social et les bénéfices générés. Toutes les décisions concernant l’évolution des parts sont prises en assemblée générale. Généralement, il n’y a pas de revalorisation de part, même en cas de cession de part. L’augmentation de capital est alors plutôt destinée à l’acquisition supplémentaire de foncier (pour des nouveaux projets d’installation par exemple). De la même manière, une diminution du capital (suite à une vente de foncier par exemple) se traduira généralement soit par une dévalorisation des parts, soit par la sortie d’associé.es de la structure.

Cet entretien est une synthèse des échanges qui ont suivi l’intervention de Julian Ackermann Aredes, chargé de mission juridique à Terres de Liens. Les propos ont été adaptés afin de refléter l’essence des discussions tout en en facilitant la compréhension et la lisibilité.

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