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Les rencontres des transitions – Webinaire #8

« le Grand dialogue citoyen : urgence climatique, tous acteurs » Une aventure démocratique à Bordeaux !

Le 7 novembre 2024, de 13h30 à 14h30

L’atteinte de l’ambition de neutralité carbone à Bordeaux nécessite d’irriguer l’ensemble des politiques publiques, d’accompagner la dynamique territoriale et l’émergence d’initiatives. Pour ce faire, le premier Grand dialogue de la Ville de Bordeaux s’est organisé autour du thème « Urgence climatique, tous acteurs ! ». Afin de mobiliser les différents publics et de permettre d’aborder différentes dimensions de l’urgence climatique, trois phases distinctes ont été proposées : l’effervescence, la convention citoyenne et l’atterrissage. L’innovation dans la pratique participative du Grand dialogue réside ainsi dans la mobilisation d’un public large dans une première phase de diagnostic pour partager ensuite la matière récoltée à une convention citoyenne dédiée et ce, sur la thématique complexe de l’urgence climatique. Cette alternance entre grand public et mini public a permis la diffusion du Grand dialogue sans perdre le caractère opérationnel nécessaire à la réussite d’une démarche de participation citoyenne.

Avec Tiphaine Ardouin – Adjointe au maire chargée de la démocratie permanente et de la gouvernance par l’intelligence collective et Maëlle Despouys – Chargée de mission.

Lien vers l’enregistrement de l’intervention : https://youtu.be/KUVa7hW7jzE

Lien vers la présentation de la convention citoyenne de la Ville de Bordeaux : https://www.youtube.com/watch?v=VoA6MmmYEKI&t=2s

Lien vers le rapport de la convention citoyenne : https://www.calameo.com/read/00148012123ef175e7a00

Retranscription de la séquence de questions avec le public

Quels ont été les résultats de la rencontre entre les membres de la convention et les élu.es ? Leur préconisations ont-elles été prises en compte ? Combien ? Sous quelle forme ?

Tiphaine Ardouin : La forme du Grand dialogue fait que beaucoup de propositions sont ressorties des différents temps de rencontre (phase d’effervescence, rencontre finale avec les élu.es). Dans un second temps, il a été demandé aux services de la ville de faire une analyse plus fine de ces propositions selon 3 niveaux :
– La proposition fait déjà l’objet d’actions en cours sur Bordeaux. Est-ce qu’elle pourrait être menée plus loin ?
– La proposition n’est pas réalisable, pour des questions budgétaires, de divergence avec les actions déjà mises en place par la ville autour de la lutte contre le changement climatique, etc.
– La proposition est réalisable, et pourrait faire l’objet de nouvelles actions à mener sur Bordeaux.

Pour donner quelques exemples concrets de prise en compte par la municipalité des travaux du Grand dialogue citoyen, lors du dernier conseil municipal, et d’une délibération sur la création de deux fermes urbaines, il a été fait référence au travail des membres de la convention en reconnaissant la cohérence entre ce projet et leurs préconisations. Aussi, dans le cadre du magazine municipal, les récits portés par les membres de la convention vont être mis en images en bande dessinée pour rendre visible la démarche.

Malgré tout, il est parfois plus difficile de mesurer l’incidence directe de la convention sur les politiques publiques. Au-delà d’une liste de propositions « simples », l’objet de la convention était de mener réflexions plus globales sur la question du climat. Le travail d’analyse en cours doit ainsi d’abord nous amener à identifier un ou deux chantiers à mettre en place avec les membres de la convention. De plus, les collectivités sont confrontées à une injonction d’économie importante qui mobilise aujourd’hui les services de la ville. Cela risque de retarder la possibilité de travailler sur ces éléments.

Un suivi de la prise en compte des préconisations est-il prévu et sous quelle forme ?

Tiphaine Ardouin : Le sujet du suivi a fait l’objet d’une demande de la part des membres de la convention. Deux instances étaient attendues, dont une ayant la compétence du suivi de la mise en place des travaux de la convention. Pour nous il semblait important de préciser que cette instance ne pouvait pas être un espace d’évaluation de la politique publique. Il a été proposé aux membres de la convention un regard sur l’Espace citoyen qui va être mis en place par la métropole bordelaise sur le suivi du plan climat-air-énergie.

Pouvez-vous revenir sur le rôle de l’assistance à maîtrise d’ouvrage Médiation et environnement et l’importance d’un tiers dans la conception et l’animation d’un tel projet ?

Maëlle Despouys : Médiation et environnement nous ont accompagnés sur les 3 étapes du projet, mais l’essentiel de leur mission a été concentré sur l’étape « Convention citoyenne ». Le tirage au sort nécessitait des moyens dont la ville ne disposait pas (par exemple la mobilisation de listes autres que les listes électorales, dans un souci de représentativité). Si les membres de la mission Démocratie permanente ont été particulièrement mobilisé.es lors des phases « Effervescence » et « Atterrissage », il y a eu une mise en retrait volontaire sur l’étape « Convention citoyenne ». Toute l’animation et la méthodologie interne et la convention ont été déléguées à l’assistance à maîtrise d’ouvrage, justement pour opérer une distinction, jugée nécessaire, entre les membres de la convention et les pouvoirs publics, et garantir une « liberté de parole et de dialogue » au sein de la convention.

Concernant le recrutement des membres de la convention, combien de personnes ont été contactées pour au final rassembler les 100 habitant.es. Quel est le coût et le temps nécessaires pour atteindre cet objectif ?

Maëlle Despouys : 5400 courriers ont été envoyés. L’écriture du contenu de la lettre a nécessité une certaine finesse, pour que ce tirage au sort soit perçu comme une chance, et non comme une contrainte par les habitant.es. Une des conséquences de ce soin apporté à la présentation du projet a été un taux de réponse très important (comparé à d’autres initiatives comme le budget participatif). Progressivement, l’effectif a été réduit à 200-300 personnes, et c’est la nécessité d’une représentativité du territoire bordelais qui a permis d’arriver au nombre de 100.

Tiphaine Ardouin : Un entretien téléphonique a été organisé avec chacune des 200-300 personnes, pour vérifier qu’elles répondaient bien aux critères d’élaboration du panel.

Maëlle Despouys : Un appel à candidature a aussi été lancé, en lien avec un certain nombre d’ateliers, notamment dans les quartiers prioritaires pour permettre de compléter le panel avec des profils plus difficiles à mobiliser (18-25, séniors, certaines catégories socioprofessionnelles, personnes issues de milieux défavorisés). Finalement, les personnes issues de cet appel à candidature ne représentaient qu’environ 10 % de la convention totale.

Est-ce que les membres de la convention étaient indemnisé.es pour leur participation ?

Tiphaine Ardouin : Non, mais en fin de convention, leur ont été remis une « attestation de participation » et de places pour des événements culturels et sportifs.

Est-ce que le cadre « climat » posé initialement a aussi permis de traiter simultanément d’autres thématiques liées aux transitions écologiques, sociales et démocratiques, et d’identifier des corrélations entre elles ?

Tiphaine Ardouin : Oui, ces liens ont été très fortement affirmés, notamment l’idée d’une transition écologique qui ne pourrait se faire qu’avec une prise en compte des différences sociales entre personnes et une participation citoyenne à la hauteur.

Avez-vous fait l’expérience de tensions au cours du processus ? Entre les personnes participant à la convention ? Avec les élu.es ?

Tiphaine Ardouin : Il avait été décidé en amont du projet que l’avis de la convention citoyenne devait traduire non seulement les préconisations, mais aussi la diversité des opinions exprimées par les personnes impliquées dans la convention citoyenne. Pendant la rédaction, Médiation et environnement nous a fait remonter une divergence assez forte sur la question du genre et de la place des femmes. Pour dépasser cette divergence il a été proposé qu’un plus petit groupe représentant les différentes formes d’opinion au sein de la convention se réunisse pour trouver un accord. D’autre part, il semblerait que le processus de co-construction en lui-même ait permis d’éviter les conflits avec les élu.es.

Les préconisations de la convention allait-elle dans le sens d’une transformation modérée ou bien plus profonde de la société ?

Tiphaine Ardouin : Un peu des deux ! Autour de la notion de « comment ralentir », la convention est allée assez loin dans les préconisations. Entre autres, la semaine en 4 jours, la fin de la publicité commerciale et la fin des paquebots à Bordeaux, la levée des freins à l’installation de panneaux solaires au titre de la protection du patrimoine architectural imposée par l’UNESCO.

Le projet de convention citoyenne a-t-il fait l’objet de contestation au sein du conseil municipal ou de la part des habitant.es ?

Tiphaine Ardouin : Nous n’avons pas eu de « levée de bouclier » de la part de l’opposition au sein du conseil municipal. En théorie, il semblerait que l’importance de la question démocratique et du Grand dialogue citoyen dépasse les clivages partisans. En pratique, certaines voix se sont exprimées appelant à dépasser le stade de consultation seule pour aller loin, vers l’implication des citoyen.nes dans la délibération, et l’échec relatif de la Convention citoyenne pour le climat est aussi revenu à plusieurs reprises posant la question de : « A quoi ça sert vraiment ? ».

Maëlle Despouys : Arriver à faire comprendre l’intérêt d’un tel processus démocratique reste un enjeu de taille. Nous avons pu observer que les participant.es au Grand dialogue citoyen devenaient à leur tour ambassadeur.rices de cette démarche, et notamment ce qu’elle avait pu leur apporter sur le plan personnel.

Tiphaine Ardouin : D’ailleurs, une trentaine de personnes ayant participé à cette expérience continuent de se réunir et d’échanger entre elles, avec pour certain.es un engagement dépassant aujourd’hui le cadre de la convention citoyenne. Cette pérennisation de l’engagement nous semble être l’une des réussites du Grand dialogue citoyen.

Cet entretien est une synthèse des échanges qui ont suivi l’intervention de Tiphaine Ardouin et Maëlle Despouys. Les propos ont été adaptés afin de refléter l’essence des discussions tout en en facilitant la compréhension et la lisibilité.

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