Cela nous parait si loin maintenant mais en ce début d’année 2020, votre réseau Cohérence en formulant ses vœux avait titré « 2020, l’aube d’un nouveau destin ? » Notre objectif est de supprimer ce fichu point d’interrogation.
L’Organisation Mondiale du Commerce, véritable apôtre de la croissance hors sol a prévenu que l’épidémie de Covid-19 pourrait faire chuter les échanges commerciaux mondiaux de 32% en 2020. Une plaie béante dans le système. Engouffrons-nous dedans !
Les activités de tous les pays sont en grande partie freinées, sauf celles jugées nécessaires. Parmi elles bien sur les soignants et tous les services et la logistique dont ils ont besoin, les agriculteurs, les travailleurs de l’agro-alimentaire, les personnels de supermarchés, les ripeurs, travailleurs de la chaine des déchets, les transports, les réseaux, mais aussi en France, tous ceux qui ne peuvent pas télétravailler et dont les entreprises sont en mesure de continuer leur activité de production avec les gestes barrières.
Beaucoup ressentent comme une profonde injustice d’aller travailler à l’extérieur en période d’épidémie, c’est-à-dire de prendre chaque jour des risques pour soi et sa famille. Ajouter au fait que beaucoup de ces métiers sont précisément parmi les moins valorisés. Ceci laissera de profondes traces qui viendront s’agréger à toutes celles encore vives. Nuits debout, gilets jaunes, manifestation contre les retraites, pour l’hôpital public, mouvement écologistes avec leurs cortèges de propositions, déceptions et de répressions.
La récession annoncée et son inévitable lot de faillites et donc de chômage vont nécessiter d’énormes plans de relance. Tout l’enjeu est qu’ils ne conduisent pas à reproduire et raviver le modèle économique mortifère responsable de profondes inégalités, du changement climatique, de l’extinction des espèces, de l’épuisement des ressources naturelles. Or comme le montre le dernier rapport sur le financement aux énergies fossiles par les banques internationales « Banking on Climate Change 2020 » publié le 18 mars dernier, depuis 2016 et l’Accord de Paris, ce sont 2700 milliards de dollars qui ont encore financés les énergies fossiles ! (Article Les Amis de la Terre).
Ou sont les ruptures ?
Le niveau européen reste une référence dans les discours et sans doute dans la stratégie économique post-corona avec peut-être un renforcement des échanges mais quid d’une réelle voix politique européenne ? Et surtout que restera-t-il de ce Green Deal approuvé en décembre dernier de 100 milliards d’euros ? (cf article sur l’UE), la Cop 26 prévue en novembre 2020 aura-t-elle lieu ? Et qu’en est-il du sommet UE-Chine initialement prévu en septembre qui devait tenter de poser les bons jalons ? No news de transition pour l’instant dans le plan de 500 milliards d’euros proposé face à la crise.
L’Etat pour sa part circonscrit les incendies, amortit les chocs en différant les charges, en payant le chômage partiel, mais rien n’est encore acté de stratégique pour une sortie de crise par le haut amorçant un vrai changement de modèle. Ainsi par exemple, 250 ONG se sont levées pour éviter que les compagnies aériennes soient refinancées sans conditions. Rien n’est dit sur une restructuration industrielle, et pourquoi pas par exemple, migrer une partie du secteur aéronautique sur l’éolien ? Dans son dernier discours, le 13 avril, le président Emmanuel Macron évoque l’après confinement d’abord pour remettre tout le monde au travail et produire ! Sans s’avancer il note cependant : « Il nous faudra bâtir une stratégie où nous retrouverons le temps long, la possibilité de planifier, la sobriété carbone, la prévention, la résilience qui seules peuvent permettre de faire face aux crises à venir. » Prenons-le aux mots et aux actes pour la suite.
A ce niveau national, la Convention citoyenne pour le Climat a rendu 50 premières propositions qui devront être entendues et surtout complétées et mise en œuvre (cf article de Vanessa Taillandier).
Au niveau régional, le président du conseil régional appelle à « la cohérence avec nos objectifs sociaux et environnementaux » mais le plan déployé jusqu’à présent ne s’y réfère pas directement et l’on sait le peu de moyens politiques et financiers régionaux, notamment ceux dédiés à la Breizh Cop. L’on sait aussi encore il y a quelques mois les aides apportées aux élevages intensifs de poulets. Pour une région agricole comme la notre, les liens entre pollution et propagation du virus sont importants comme le précise le Dr Lylian Le Goff dans son article.
Au niveau local, la séquence avortée des élections municipales n’est pas représentative dans ses résultats au vu du contexte d’abstention mais près de 2500 équipes candidates ont signé des engagements du Pacte pour la Transition et les 32 mesures ont été diffusées dans le pays. Quand il sera temps, exigeons qu’elles soient respectées et continuons leur diffusion.
Passons des paroles aux actes !
A toutes les échelles prenons maintenant notre destin en main. Comme nous l’écrivions en début d’année : « régulièrement et avec acharnement il nous faut nous battre encore contre les conservatismes, les intérêts corporatistes et financiers de quelques-uns au mépris des biens communs ». Avec la pandémie, ces mots résonnent plus encore.
Des mots il y en a tant depuis des décennies pour dénoncer un système économique déconnecté des hommes et des écosystèmes. Et pourtant il perdure. Des pétitions, des tribunes, des articles tous plus affutés les uns que les autres, Marc Pouvreau notre secrétaire général et trésorier nous en résume quelques-uns qui auraient pu vous échapper. Les solutions sont déjà pensées, écrites et argumentées.
Nous savons quoi faire mais il manque la forte volonté politique certes mais pas seulement. Transformons en actes la force et la volonté de transition sociale et écologique de tous les citoyens qu’ils soient artistes, retraités, sans activité, salariés, entrepreneurs, membres d’association, etc…
Et pour nous organiser collectivement, Jean-Claude Pierre nous rappelle les avantages incontestables des coopérations, des solidarités face à la compétition et la spéculation. Le modèle de compétition est perdant-perdant, il n’y a qu’une seule terre pour tous nous abriter et nous devons coopérer. Soutenons les coopératives !
L’alimentation est au cœur de la transition, Armina Knibbe nous livre son souhait de voir émerger des coopératives nourricières et engage chacun de nous à se former en permaculture ou en agro-écologie et surtout d’expérimenter par soi-même. Développer les cultures maraîchères est crucial en France pour retrouver une autonomie alimentaire. En France seuls 2% de la surface agricole utile est consacrée à la production de fruits et légumes alors qu’il en faudrait au moins 10%.
Pendant le « confinement » profitons-en pour progresser à notre échelle, dans notre famille. Ce temps doit être mis à profit pour amplifier nos actes de transition, les partager, et les essaimer, jouer les réseaux et le partage d’expériences. L’agenda des transitions à l’échelle individuelle ou familiale est un outil concret, il permet à chacun de progresser, de choisir d’orienter ses actes en fonction de leur impact sur le système. Nous vous proposons de le (re)decouvrir, de l’appliquer du mieux possible, chiche ?? (Télécharger le document dans l’article ci-dessous). Chaque geste peut être relayé au niveau de la Bretagne #BreizhCOP
Progressons dans notre propre transition tous ensemble !