La revue Global fustige dans un long article du 21 octobre dernier, l’attitude des dirigeants de la FNSEA. En voici quelques extraits :
Par une lettre à en-tête des « Chambres d’agriculture de Bretagne », datée du 28 septembre 2015, diffusée aux agriculteurs et à la presse professionnelle, les présidents des chambres d’agricultures du Finistère, du Morbihan, des Côtes d’Armor et d’Ille et Vilaine, ainsi que le président de la chambre d’agriculture de Bretagne appellent à « ne pas remplir la déclaration de flux d’azote 2014/2015 ». Ils justifient leur incitation à enfreindre la loi par leur refus de « cette réglementation inacceptable ». Sur fond de crise grave des élevages industriels, leur argumentation joue de contre-vérités et d’amalgames pour entretenir une confusion qui masque leurs responsabilités dans la crise. L’amalgame entre simplification administrative et normes sanitaires est une grosse ficelle qui ne rebute pas les présidents de l’agriculture bretonne, tous syndiqués à la FNSEA : ils se réfèrent à la déclaration du Premier ministre, le 3 septembre dernier – « la simplification des normes est une priorité» – pour déroger au contrôle des flux d’azote.
Réactions
Dans une lettre au président de la Chambre régionale d’agriculture, signataire de cet appel incivique, La Confédération paysanne rappelle à l’élu consulaire régional qu’il représente toute la profession et que « L’appel au boycott de la déclaration des flux 2014/2015 que vous encouragez nous paraît aller à l’encontre du sens des responsabilités qui doit être le vôtre. ». Poursuivant son analyse, le syndicat porteur d’alternatives agroécologiques en Bretagne, souligne que « Les résultats encourageants vis à vis de la reconquête de la qualité de l’eau doivent nous inciter à maintenir la pression. Détourner l’attention des agriculteurs de cet objectif nous parait une stratégie dangereuse pour la profession toute entière. Le contentieux avec Bruxelles, l’attente des citoyens, l’exigence de résultats au regard des fonds publics injectés depuis tant d’années, sont autant de facteurs qui exigent que nous soyons irréprochables.
L’association Eaux et rivières de Bretagne, à la pointe de la lutte pour la qualité des eaux en Bretagne, a immédiatement saisi le ministère de l’Ecologie et celui de l’Agriculture, le Conseil Régional de Bretagne, ainsi que les préfets bretons, pour qu’ils s’assurent que la règlementation adoptée en 2014 soit appliquée. L’association a également demandé que dans le cadre de la tutelle exercée par l’Etat sur les chambres d’agriculture, leur soient rappelés leurs devoirs et obligations. « Eaux et Rivières » rappelle que « cette déclaration obligatoire des flux d’azote, a aussi été largement utilisée dans les négociations avec la Commission européenne pour obtenir la sortie du contentieux européen sur les prises d’eau redevenues conformes. La note des autorités françaises à la Commission européenne en date du 23 juin 2014 insistait précisément sur le caractère « utile de cette disposition à la fois pour le ciblage des contrôles et pour mieux connaître les flux d’azote et la pression d’azote au sol sur le territoire breton ». Voilà une violation d’engagement qui ajoutera à l’aura de la parole française au niveau européen.
Le point de vue de Cohérence
A quelques semaines d’un acte civique déterminant pour l’avenir de la Bretagne que sont les élections régionales, on ne peut qu’être profondément perplexe de cet appel à l’incivisme. D’autant plus qu’un des cosignataires de cette missive est lui même sur une liste électorale en la personne d’Olivier Allain président de la Chambre d’agriculture des Côtes d’Armor et candidat aux élections régionales sur la liste de Jean-Yves Le Drian.
L’ambiguïté des politiques et du gouvernement sur le respect de la réglementation européenne à laquelle la France s’est engagée, contribue très gravement au discrédit de la parole publique et disqualifie les représentants de la souveraineté nationale. Tout est permis aux lobbys de l’agriculture intensive et de l’agro-alimentaire même dans leurs représentations les plus officielles. Comment dans ces conditions croire aux exhortations visant à contribuer activement à la lutte contre le réchauffement climatique dans le sillage du battage médiatique de la COP21.